Mon absence en ligne est aussi un éparpillement cérébral et une fatigue immense, en cette saison qui ne me permet pas de repos, habituellement. En attendant, dès la première minute de ménage de bureau, j’ai trouvé comment m’interrompre cet élan ménager, et en beauté: j’ai ouvert au hasard De l’eau salée dans les veines, du poète Roland Jomphe, ambassadeur de la Minganie. Je vous offre ce que j’y ai lu.
Les coques
Coquilles cachées
Au sable des grèves
Le soir descend la marée
Et le jour achève.
Ancêtres de jadis
Homme d’hier ou d’aujourd’hui
Passé de la saison jadis
Ici pourtant n’importe quoi.
Quand le soleil fond la glace
Au retour du printemps
On y trouve la trace
La batture d’ancien temps.
En portant la pelle d’acier
Sur le temps la grand’mer
Tout le long du glacier
Le souvenir d’avant-hier.
Remuant le sable
Sur un coin de marée
L’ancien temps est au sable
Remuant la pensée.
À la soif la nature
Au printemps qui revient
Impressions de batture
La marée s’en souvient.
Courbées sous la pelle
Les anciennes saisons
La saison est nouvlle
Aussi bien les raisons.
Parmi les produits
De la mer au printemps
Les coques endormis
Aussi le vieux temps.
L’hiver est passé
Au sable durci
Ensevelis ou cachés
Tous ceux qui ont fui.
Pendant que l’horizon
Apparaît mieux doré
Arrive la saison
Coquilles broyées.
Renouveau de soleil
Au sable de grève
Le temps y est pareil
Le passé n’est que rêve.
Beau jour de printemps
Même long est trop court
Et ici l’ancien temps
Y paraît bien plus court.
Devant la marée
La nature encalmée
Réfléchit quand même.
Quand l’âme encalmée
Devant la pensée
Réfléchit de même.
Coquilles broyées
Couchées sous les grèves
Comment sont les années
Couchées sous les rêves.
Roland Jomphe, De l’eau salée dans les veines