Non, vous ne voyez pas la maison. Parce que la maison qui se dresse là… ce n’est pas celle que mes parents ont bâtie. Enfin oui, la structure est la même, mais l’apparence ne l’est plus. L’intérieur non plus, ou si peu (la maison est constamment en vente depuis que mes parents l’ont vendue, au point où quand je dis à quelqu’un d’ici que je suis née ici, je dis dans la maison qui est toujours en vente, et ils savent de quoi je parle, et donc j’ai pu voir des photos de l’intérieur en ligne l’année dernière. Si j’ai pensé l’acheter? Non. Seulement quatre chambres, un terrain qui n’est plus celui de mon enfance (il a été divisé et une maison le surplombe maintenant!), et le prix demandé était un prix… pour urbain mal informé, préférablement un urbain américain qui ne connaîtrait rien aux prix d’ici!).
Quand mes parents ont acheté le grand terrain, il n’y avait rien. Ou enfin, une cabane. Qu’ils ont habitée le temps de construire. J’ai des photos de moi (comme celle-là) qui montrent que la maison a été terminée lentement (mes parents avaient des priorités autres qu’esthétiques: ils avaient un grand terrain à cultiver et une puce à éduquer!), mais sûrement. Quand j’y pense, j’ai envie de m’endormir pour mille ans, tant le travail qu’ils ont eu à abattre dépassait celui que nous nous sommes offerts ici, tout près. J’ai une autre photo quelque part. Ma mère, (très) enceinte de moi, est juchée sur le toit. Quand mes parents ont bâti, ils ont dû faire venir Hydro. Ils ont dû… nommer le chemin où ils avaient bâti, car la nôtre était la première maison permanente là (ça me fait drôle maintenant de voir qu’au moins quatre maisons y sont habitées à l’année) et même choisir leur adresse civique! (Et dire que je me trouve démunie (côté connaissances, et j’y travaille, et côté ressources) depuis que je suis ici!)
Au fil des ans, je suis repassée devant la maison. J’ai vu qu’on avait coupé les branches basses d’arbres qui m’ont vu jouer. Que le garage devenait autre chose. Que les bâtiments de ferme (agricole) avaient été démolis en partie. Revoir mon premier chez moi me faisait mal, mais je ne pouvais non plus m’en passer. C’est que j’ai fini par avoir une enfance assez rock’n roll par certains aspects, mais que là, je n’ai connu que paix et bonheur (parce que trop jeune pour voir autre chose, et trop choyée par la beauté qui m’entourait). C’est resté un havre pour moi, un espace mental à défaut de physique. C’était et c’est de là que je viens. Maintenant? En dix minutes à pied, j’y suis. Chaque jour si je le souhaite. Et la douleur, la déchirure de ne pas appeler cette maison mienne, est partie. J’ai mieux qu’un bon souvenir, à présent: j’ai un bon… présent!
N’empêche. Les mains qui ont bâti cette maison, les corps qui ont sué dans ses recoins incomplets, tous ces gens qui ont contribué à l’ériger sont reliés à moi, par le sang ou l’histoire. Mes deux grands-pères m’y ont bercée. L’un y a même vécu avec nous. Et j’aimerais, au lieu de la voir encore et toujours mise en vente, voir ma maison à nouveau pleine d’une famille. Je voudrais y imaginer une puce qui roule sur la petite pente gazonnée, voir de la fumée sortir de la cheminée, y rencontrer un gentil toutou qui deviendrait ami du mien (pour Tango, se faire des amis n’est pas très compliqué…). Je voudrais savoir que tout l’amour que mes parents ont mis dans ces murs (car oui, mes parents se sont beaucoup aimés avant que leur histoire ne devienne banalement malheureuse) profitent à d’autres gens heureux. Et tant qu’à y être, j’irais les voir, et ils m’inviteraient à entrer. Et je leur dirais tiens, ceci a changé; tenez, à l’origine…
C’est le mot: cette maison, c’est mon origine.
C’est drôle ça…
Moi je ne vois plus du tout la maison où j’ai grandi… Elle a brulé il y a 9 ans. Mon frère en est sorti in extremis, il était le seul à la maison.
Depuis le terrain a été vendu, une nouvelle maison est là. Seul le vieux cabanon est encore sur le terrain.
Ça me fait drôle quand je vois cette maison neuve sur notre terrain.
Mon conjoint a peu de souvenir de la maison où j’ai grandi. Moi, j’en ai encore moins de celle où il a grandi, car elle est passée au feu le lendemain de ma première visite officielle dans la famille!
Ça veut peut-être dire qu’il faut vivre le présent et regarder vers l’avenir!
…ou que tu causes des incendies là où tu passes! Aïe!
Vivre le présent et regarder vers l’avenir… je le fais. Mais j’ai vraiment besoin d’être ancrée et ça… c’est du passé! 🙂
« …ou que tu causes des incendies là où tu passes! Aïe! »
Ben pas d’accord!
Je demeurais à environ 200 Km de la maison de mes parents quand elle est passée au feu ;P
Pour le passé, le présent et le futur, je parlais plus pour moi.
Je suis quand même revenu rester dans ma région, j’y suis ancrée si on peut dire!
;-P
Mon ancre est lourde, je crois: faudrait que je mesure la distance entre ma maison actuelle et celle où j’ai grandi, mais je doute qu’on atteigne le demi-kilomètre! C’est simplement que la corde qui m’attache à l’ancre est très élastique: 27 ans à 150 km de là, et elle tient toujours! 🙂
« L’originalité, c’est le retour à l’origine » Gaudi
Il est né dans un village, Gaudi? 😉
Parce qu’ici, oui, revenir c’est pas mal original. La plupart des jeunes partent vers leur propre ailleurs et peu reviennent. (Oui on me dira que c’est l’absence d’emploi, et je répondrai « ah oui? et moi alors? un emploi, ça se crée!) Les « nouveaux arrivants » sont surtout à la retraite.
Enfin, je conçois que l’on puisse ne pas avoir d’attachement à ses origines ou qu’on l’ait évacué… mais ça me semble impossible pour moi (et non souhaitable, à tout prendre!). N’empêche que j’en profite aussi, parce que si l’Homme avait été attaché à ses racines profondes, il m’aurait parlé de Peterboro… et moi, j’aurais répondu « non mais ça va pas mon Zozo? ».
mes parents ont vendus la maison de mon enfance cet été…devinez-
oups 🙂
mes parents ont vendus la maison de mon enfance cet été…devinez-qui l’a acheté ? c’est moi. j’ai tjrs rester la depuis ma naissance. je suis partie a montreal quelques annees mais je m’y suis jamais sentie super bien, et la j’avais l’opportuniter d’acheter ma premiere maison, donc j’ai dit : on le fait ! mon chum trouvait qu’on etaient pas mal jeune pour s’en aller en banlieue. mais j’ai ressenti l’appel. ca fait drole au debut de prendre sa place dans un endroit ou on a ete longtemps considerer comme le kid dans la place. ca fait bizz de continuer le jardin a maman, mais je trippe. je nourris les oiseaux et je reve des legumes que je vais planter cet ete. je repasse devant le depanneur aux bonbons a 1 cent avec un gros sourire. pour moi la banlieue, c’est jolie et pleins de souvenirs et de promesses…meme si je reve un jour de me retrouver en campagne comme toi bandite 🙂 tu as l’air vraiment bien dans ton coin de pays !
Ah, Marie, quel rêve! Petite (donc pas mal ignorante de la réalité de la vraie vie!), je croyais sans le remettre en question que je vivrais toujours dans cette maison (je ne sais pas trop où je mettais en rêve mes parents…). J’ai passé des heures à tout remanier à mon goût en pensée (ça ne coûtait rien!). Il n’y avait tout simplement pas d’autre maison pour moi!
En effet, ça doit être spécial de changer de statut, de passer de « la fille de » à « madame chose »! Wow!
Je n’ai jamais vécu en banlieue, et je ne crois pas que j’y serais bien… mais justement, c’est parce que je n’y ai jamais vécu, aussi je n’ai pas de souvenirs qui me la rendent accueillante (plutôt des souvenirs de me perdre partout en périphérie, oui!). Par contre je comprends totalement que quand on y a été heureux, elle puisse nous combler à nouveau! Et dans une maison aimée en plus! Il faut dire qu’enfant unique de parents pas trop portés sur les traditions, moi justement, j’aime les traditions! J’adore l’idée d’une maison qui voit passer les générations, la transmission du parent à l’enfant… Bon, j’arrête avant de verser des larmes d’attendrissement!