Dans le meilleur des cas, former un couple avec un père célibataire, c’est un peu comme une famille déshydratée: on ajoute juste un peu d’amour et hop, on obtient une famille instantanée! Dit comme ça, caricaturalement, je peux dire que j’ai eu ça, y compris un p’tit gars (qui fait une tête de plus que moi maintenant, qui a voté aux dernières élections et) qui jamais, pas une seule fois, ne m’a dit le fameux T’es pas ma mère! que j’attendais pourtant, probablement à cause de toutes les émissions de télé et de tous les films (modernes, là!) dans lesquels on voit une belle-mère (scénaristes, prenez-en note, cette réplique n’est pas re-qui-se!).
J’ai longtemps pensé que quand le Coco aurait 18 ans, j’en aurais, des choses à dire, sur ce titre et cette fonction de belle-mère qui sont les miens. Qu’enfin je pourrais me vider le coeur. Parce que si entre le Coco et moi ça a toujours été plutôt facile, notre réalité de famille recomposée ne l’a pas toujours été. C’est plus compliqué, forcément: il y a quelque part un autre parent, peut-être un autre beau-parent. Qui vivent autrement. Y a l’historique du couple et de la famille qui n’existent plus. Et il y a aussi des grands-parents. Qui ont leurs opinions, leur mode de vie, leurs intentions, leurs moyens et leurs méthodes. Leurs insécurités, aussi, et tout ce qui fait d’un humain un être foutument complexe. Ça n’a pas toujours bien fonctionné entre nous (moi! moi, le cheveu sur la soupe, la cerise sur le sundae, la non-choisie d’eux, forcément) et la famille élargie. Pourtant… pourtant on a fini par trouver notre place (oui, loin, physiquement), notre zone de confort. Et de coeur à vider je n’ai plus. Ce qui pouvait me sembler grave ou paniquant et ce qui me rendait perplexe ou furieuse, bof… le temps a gommé le vif du sujet. Avant, j’aurais pu écrire tout un essai sur le caractère ingrat de ma fonction. Maintenant, je vois ça autrement (j’ai vieilli, aussi, et le recul fait des merveilles).
Sur les formulaires, il nous faut maintenant cocher la case «Famille recomposée avec un ou des enfants en commun». Ça change la donne et la dynamique (mais ça ne change pas tout: la routine avec un jeune enfant, nous l’avions déjà vécue ensemble, comment nous souhaitions être comme parents, c’était déjà pas mal réglé, réfléchi). Ça me donne une place légitime, celle de mère (ça, ça change quelque chose dans le regard des autres, pas dans notre réalité. De nombreux amis n’avaient jamais compris que j’était déjà parent avant d’accoucher, c’est quand même incroyable puisque ça faisait 10 ans que je l’étais!). Pourtant, mère ou belle-mère, je ne fais rien de différent, je n’aime pas autrement. J’aurais voulu avoir mes enfants plus tôt, plus jeune. Ah, mais c’est un piège: j’aurais été autre, ils auraient été d’autres, c’est impensable! J’aurais aimé que le Coco grandisse avec un frère, une soeur. Il réclamait une fratrie depuis longtemps. La vie a voulu que ça se fasse plus tard, et c’est toujours elle qui décide: pas de regrets là.
La grande différence d’âge entre les enfants chez nous donne des résultats touchants. Il est hilarant (ou exaspérant, ça dépend!) de voir la soeur et le grand frère parfois se chamailler, se tirailler et se dire des niaiseries comme s’ils avaient le même âge (pas le plus mature des deux…). De constater entre eux une compétition digne de n’importe quelle fratrie. Effrayant de les voir se mesurer quand ils ont tous les deux faim sans le savoir (ils. sont. pa. reils! Au secours!) et montent sur leurs grands chevaux. Il est magnifique de voir le sourire du petit frère qui aperçoit le grand, même au loin, même partiellement, et son visage s’illuminer quand son héros lui sourit. Il est émouvant de les voir, l’un ou l’une dans les bras de l’autre, chaque jour, plusieurs fois par jour.
Avez-vous remarqué? Chez nous, dans notre famille, personne n’est à moitié là. Pas de demi-personnes. Pas de demi-soeur ni de demi-frère. C’est un choix de vocabulaire, mais c’est surtout un choix familial. Parce qu’une famille, ça se construit (ah, ça s’entretient aussi, ça se change, ça se rénove, et parfois on bâtit une annexe, et on installe une piscine et… oups, je pense que j’ai étiré ma métaphore un peu trop loin, là!)!
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Quel billet touchant et émouvant Hélène.Longue vie à ta si belle famille!
Merci, Lyne. Parfois… «j’parle tout seul car Jean Narrache» (héhé)… d’autres fois j’essaie d’explorer autre chose ici, un peu. Ça mijote ici!
Oh que ça pousse aussi bien dans ta maison que dans tes potagers, toi! Waouh! 😀