Il n’y a pas si longtemps, quand les refuges pour personnes en situation d’itinérance ont crié à l’aide et demandé à tous ceux qui le pouvaient de venir prêter main forte, je serais allée. Si je n’avais pas eu enfants, chats et poules qui ont besoin de moi du matin au soir, j’aurais lâché ma petite vie momentanément pour y aller sans hésiter. Je n’en parle pas ici, mais l’itinérance et les personnes qui la vivent m’interpellent. (Je voudrais que quelqu’un dise à la sympathique mairesse de Montréal de faire plus attention quand elle en parle, car elle a tendance à dire ces gens-là comme s’il ne s’agissait pas d’absolument n’importe qui, vous, elle et moi compris. [Voilà ce que ça fait que d’éduquer un enfants avec Brel comme trame sonore: pour moi, ces gens-là, ça frappe fort!])
Eh bien Jean Bourbeau est allé, lui, et il en a parlé dans Urbania. J’aurais voulu un texte quatre fois plus long: il frôle l’essentiel à bien des égards. Y a du cru et de la vérité dans ce témoignage. En parquant ces personnes un peu n’importe comment, en les redéracinant pour cause de résultat de dépistage positif, on a créé tout un chaos. Mais voilà, c’est bon qu’on puisse en prendre conscience, qu’on le voie. Même après la lecture, je serais allée. C’est plus fort que moi, l’injustice, la marginalisation, la déshumanisation, le jugement, le mépris que vivent ces personnes, ça vient me chercher. Je n’aurais rien réglé moi non plus. N’empêche que faire mille tâches disparates dans une journée sans espoir quelconque de voir le bout, en essayant de régler ou d’améliorer des petits bouts de réalité ici et là, ça me connaît.