Quand on grandit à plusieurs kilomètres d’un petit village, dans un rang où il y a une seule maison occupée à l’année, et qu’on est enfant unique, l’Halloween, ben… ça se passe plutôt à regarder Linus attendre la Grande Citrouille. Passer de maison en maison pour des bonbons? Impensable. Acheter (cultiver?), décorer ou manger une citrouille? Mes parents ne semblent jamais y avoir pensé. J’ai eu mon baptême de la citrouille il y a quelques années, quand Coco (alors Petit Coco) est rentré de la maternelle avec un sac de pommes qu’il avaient cueillies (pas une super idée quand on ne laisse pas les enfants grimper: ils font ce qu’ils peuvent et ramassent les pommes tombées… et pas toujours récemment!), une citrouille miniature, et de grands yeux bleus qui me suppliaient de transformer la courge en oeuvre d’art. Et son père qui n’allait pas être de retour avant deux heures… Devant un enfant de cet âge, me suis-je dit, on peut faire semblant (en fait, je me suis dit que je pouvais faker en masse). Pas question qu’il se doute que je suis une incompétente de la cucurbitacée! J’avais vu juste, car mon incompétence avait pour compagne sa grande naïveté sans expérience avec un couteau: il a été ravi du résultat, et moi ravie de cette première fois.
Depuis, chaque année j’achète des citrouilles. J’en décore une, habituellement (une année, j’en avais acheté des petites pour les marches devant la maison, et à la fin de la soirée je les ai données aux moins jeunes qui traînaient chez nous pour finir notre énorme réserve de bonbons). Je cuis la chair, je la congèle, j’en tire des soupes. Je fais griller les graines. Je me suis découvert un grand amour pour la citrouille dans son ensemble. Ah oui: j’en ai même donné à ma Milady quand elle a eu des problèmes de constipation (utiliser la purée cuite, que l’on peut congeler en petites portions, et la servir à la chatte récalcitrante dans une seringue sans aiguille; c’est peut-être un peu grano comme solution [merci à ma gentille vétérinaire], mais c’est moins gênant que toutes les conversations que j’ai eues avec des pharmaciens qui tentaient de déterminer la bonne quantité de métamucil pour une puce féline âgée…).
Bref, j’aime la citrouille sous toutes ses coutures. Toutes? Eh non. L’autre jour, à la Ferme Régis, je n’ai pas pu résister à la St-Ambroise à la citrouille. Une bonne bière, que je me suis dit, et avec de la citrouille en plus! Misère, seulement en paquet de quatre bouteilles? Eh bien une m’a suffi. À l’Homme aussi. À une amie aussi (qui ne la trouvait pas si mal tant qu’elle grignotait en même temps mes cornichons marinés…). (Vous voulez la quatrième? Venez, elle n’est pas réclamée…) Je ne connais rien de technique à la bière, je vous l’ai dit. Ah, mais j’ai aussi dit que je sais si j’aime ou si je n’aime pas, et dans ce cas-ci, je peux même dire pourquoi. La Folie douce aux bleuets goûte les bleuets (une excellente bière pour un déjeuner en camping près du feu, croyez-moi sans trop me juger…); la St-Ambroise à l’abricot goûte l’abricot; les Éphémères aux pommes et à la pêche goûtent respectivement les pommes et la pêche (j’apprends ainsi l’existence de l’Éphémère aux canneberges, que je me dois maintenant de goûter!). Mais la St-Ambroise à la citrouille, elle, goûte… la tarte à la citrouille. Dégueulasse. Enfin, peut-être correct si on vous avertit: tiens, voici une bière… à la tarte à la citrouille. Mais sans cet avertissement? Ou. A. Che. Enfin, c’est l’opinion ici. Faites-en l’essai vous-même et dites-moi si vous en pensez autre chose. Je vous conseille cependant, si c’est d’une bière que vous avez envie, d’en acheter une autre sorte aussi!