Je suis incapable de faire cuire du riz sans mon cuiseur (instructions ou pas, appel à ma mère ou pas, le résultat est désastreux), et c’est entièrement la faute des Vietnamiens. Oui, des Vietnamiens. Quoi, vous ne saviez pas qu’ils tentent de conquérir le monde entier? C’est que vous n’avez jamais goûté la bonne soupe tonkinoise, jamais rencontré une conspiratrice ninja à ses heures, qui vous nourrit (vous engraisse, oui! pendant qu’elle reste svelte, elle!) et vous conquit par le bedon!
Petit retour en arrière. Il y a de ça quinze ans, j’étais terrorisée à l’idée de commencer l’université (dans un programme où la plupart des autres avaient déjà un diplôme). Par une amie commune, j’ai rencontré une autre trouillarde. Je ne me doutais encore de rien. Mais au fil des semaines et des mois de cette première année universitaire, j’allais en venir à être conquise, vaincue par la conspiration vietnamienne! Devenue ma grande amie, ladite ninja camouflée m’a d’abord fait découvrir la soupe tonkinoise. Celle de sa mère! Oh. La. La. Et si ça n’avait été que ça! Non, ils ont surenchéri! Rouleaux impériaux! Thé! Riz au jasmin! Ah, ce riz! Collant! Pas l’Uncle Bens dégueulasse de mon enfance (scuze, Mom…), non! Du riz qui vous force à adopter les baguettes, du riz… à baguettes! (Oui la conspiration va loin: jusqu’à transformer vos ustensiles en bâtons!)
Un bon soir, je dis au revoir à la gentille maman de mon amie à la cuisine. Elle se tourne vers sa fille et lui parle en vietnamien… Ce cuiseur à riz, me dit-on ensuite, c’est pour toi. Car grand-maman vietnamienne s’en est acheté un neuf, et celui-là… c’est pour moi. C’est ce qui arrive quand on complimente à foison. Mais non c’est trop, c’est… Rien n’y fait. Eh bien merci! Merci beaucoup! Beaucoup! Et cette énorme poche de riz au jasmin… c’est pour toi aussi! Alors là non. C’est vraiment trop. Mais la maman de parler trrrrès vite en vietnemien… et sa fille de se tourner vers moi et de dire, d’un air qui dit bien que maman ne veut pas de discussion, que oui, je pars avec cuiseur… et riz!
Et vous savez quoi? Je l’adore, mon cuiseur. Il a un bon karma. Il me vient d’une grand-maman, de sa bonté, et il ne m’a jamais lâché. J’étais étudiante: vous pouvez me croire, j’ai fini par tout manger le contenu de la poche de riz. Avec baguettes et bonheur. Et au fil des ans, cuiseur aidant, j’ai baissé les bras et accepté mon rôle dans le complot. Je suis battue, infiltrée, vaincue. Si ce n’était que la soupe, j’aurais résisté, je n’aurais pas laissé la conspiration gastronomique vietnamienne avoir le dessus. C’est le riz qui m’a cuite.
J’y ai repensé: dans les semaines qui ont suivi, je me souviens avoir mangé beaucoup, beaucoup de riz et avoir mangé tout et n’importe quoi avec des baguettes.
J’en ai appris davantage: avant d’être celui de la grand-maman, ce cuiseur a nourri toute une famille qui venait d’immigrer! (Et cette histoire d’immigration est intense mais magnifique. Ma.Gni.Fi.Que.)
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C’est drôle la mère de ton amie vietnamienne me fait penser à ma mère allemande. Genre over sociable qui jase avec mes amis, qui les invite à boire un drink en attendant que je revienne de la pharmacie et les invite à venir souper avec nous (et les amadoue à l’alcool et au ventre haha). C’est surprenant au début pour les autres, mais ils s’habituent et apprécie. Conquérons le monde avec nos recettes! Hahaha
Question de conquête, c’est efficace… et agréable!
J’aime que l’on me raconte des histoires. Celle-ci est belle.
Merci! Ce que m’a dit mon amie à la lecture? Que j’avais raison: il a un bon karma, ce cuiseur!