Ah, la campagne! Ce lieu magnifique (c’est vrai) où on s’installe avec bonheur (toujours vrai!) pour devenir un étrange (aux yeux des locaux comme aux yeux des urbains dont nous étions jusqu’au déménagement). Il y a quelques années, j’ai dû appeler Hydro-Québec parce que notre poteau électrique penchait… de plus en plus. Oui, notre poteau: il est dans notre entrée, sur notre terrain. Vous pouvez pas imaginer (à moins d’être néorural vous aussi) la difficulté que j’ai eue à faire comprendre ça à la préposée — sans aucun doute urbaine — à laquelle je parlais. Non, madame, pas le long de la route: dans mon entrée, là! Elle m’a dit qu’elle enverrait quelqu’un.
Des semaines plus tard, une petite équipe s’est présentée. A regardé. Son responsable m’a dit qu’il signalerait le poteau comme devant être remplacé. D’urgence.
D’autres semaines ont passé. Le poteau continuait de pencher. Jusqu’à un matin. J’étais dans la cuisine, et j’ai entendu un bruit. À la fenêtre, quelque chose dans le paysage me semblait… différent. Eh oui! Le poteau était tout simplement tombé, POW. Son fil? Juste sous l’avant de ma voiture (quand même une chance, hein: ça aurait pu être terrible). Alors j’ai rappelé. Éteint le panneau électrique, et attendu.
Une autre équipe, plus imposante, est venue (en moins de deux heures, si je me souviens bien: cette fois, l’urgence était difficile à nier!). De la fenêtre, nous avons regardé l’opération du changement de poteau. Ça a été fichtrement long, mais peu importe: nous étions pris chez nous, le fil passant sous l’auto la bloquant en place et les camions bloquant l’entrée. Et puis ça n’arrive pas tous les jours d’avoir une équipe d’Hydro chez soi qui s’active! (En y repensant, je me dis que j’aurais dû faire du maïs soufflé tellement nous étions installés comme pour un spectacle!) Le vieux poteau a été enlevé et coupé en tronçons. Or ce vieux poteau-là portait une plaque en métal. Avec une date. 1955 ou 1957, mon Homme et moi ne sommes plus certains, mais voilà, le vieux poteau avait été en place pendant plus de 50 ans.
Les photos d’aujourd’hui, avec un pic chevelu et ses trous, présentent notre poteau tout neuf. Neuf d’il y a trois ou quatre ans. Manifestement plein d’insectes que vient déguster ce pic (ça fait changement du suif, on le comprend de profiter du printemps). Il ne penche pas, ce poteau, mais se tient bien droit. Mais jamais il ne pourra durer 50 ans. Est-ce parce que l’autre avait été traité pour être empoisonné, donc résistant? Je ne sais pas (le nouveau poteau est verdâtre, ce qui me laissait croire qu’il avait été traité d’une manière quelconque, mais vu la différence d’époque entre les deux, je présume qu’on utilise des traitements moins toxiques de nos jours…?). Tout ce que je sais, c’est que les employés de terrain d’Hydro auront du boulot ici, encore une fois… dans moins de 50 ans!