Il me semble bien que, de la ville, on croit que la campagne permet de prendre le temps. De tout. D’observer, de goûter, de voir venir. Et regardez un fermier aller: il est calme, posé, il sait quoi faire quand et le fait, sans ronchoner (j’ai d’ailleurs réalisé récemment d’où me vient mon amour à la fois déraisonné et pragmatique pour les chats et les chiens: de la ferme où j’ai semi-grandi. C’est pourtant évident: quand on a des animaux, on répond à tous leurs besoins, sans s’en sentir étouffer, simplement parce que c’est comme ça et qu’on accepte les responsabilités de nos choix. C’est pour cela que quand Milady est morte au printemps, je n’ai ressenti aucun soulagement de ne plus avoir à lui donner ses médicaments matin et soir et à ne plus devoir nécessairement revenir chez moi aux douze heures. Elle en avait besoin, je le faisais, c’est tout, et je ne sacrifiais rien, je plaçais mes priorités). Vous, citadins, par exemple: vous louez un chalet, réservez dans une auberge ou visitez des amis. C’est une pause. Vous avez du temps, vous l’avez réservé et vous vous l’offrez. Comme ce serait bon, vous dites-vous, de vivre ainsi.
Il me semble bien qu’enfant, je vivais des années infiniment longues, de Noël en Noël, de la rentrée à la fin des classes. Septembre à juin, une éternité. Maintenant? Comme moi, vous vieillissez. Vous savez. Il file, le temps! Hier j’ai connu un Coco haut de trois pommes. Demain? Il pourrait bien tenter de me reléguer au siège arrière en me disant qu’ils est plus grand! (Bonne chance: il reste que c’est mon char!) Je ne sais si le temps a accéléré ou moi ralenti, mais tout passe vite, années, mois, saisons. Et des amis plus âgés me disent que ce n’est pas près d’arrêter. Comment alors faire le saut, plonger dans le temps plus lent de la campagne? Encore faudrait-il le trouver, ce temps lent! Car la réalité n’est pas qu’auberge et chalet. La réalité, c’est que tandis que vous hésitez entre resto et cinéma, moi, j’ai tout un terrain à désherber, tout un hiver à préparer. L’Homme a du bois à fendre, du béton à sceller, des trous à creuser. On se lance dans un projet, on en fait la priorité. Puis un robinet nous lâche. À nous de tout lâcher pour une urgence de plomberie. Et quand ce n’est pas ça, c’est autre chose. Le temps de souffler? Quand?
Il me semble bien maintenant que la campagne fonctionne en deux temps. Peut-être un à l’intérieur et un à l’extérieur. L’adaptation est rude. Joyeuse, mais difficile. Il nous faut apprendre la patience, car inévitablement il faudra reporter certains projets. Pourtant, une fois nos habitudes rodées, nous aussi nous pourrons souffler. C’est simplement que nous n’avons jamais appris à vivre ainsi, non pas dans l’oisiveté bienheureuse des loisirs, mais dans les obligations parfois frustrantes mais combien productives. Une chose à la fois. Et souvent pas celle qui était espérée. J’imagine que notre temps va ralentir d’ici quelques années, quand nous aurons rattrapé un retard qui n’est pas le nôtre et que nous nous serons adaptés. Parfois je pense à l’hiver en me disant que ce sera un moment de repos. Mais je me reprends rapidement: vous n’y pensez pas! La neige à pelleter, les fenêtres à dégager, le chien à promener en raquettes, les semences à découvrir, commander et faire germer, l’intérieur de la maison à continuer, le bois à entrer… Et tout ça si tout va bien, si l’électricité ne fait pas défaut (ah oui, une chose à laquelle les citadins ne pensent pas: sans courant, je peux chauffer au bois, pas de problème, mais sans courant… nous n’avons pas d’eau! Car la pompe qui tire l’eau du puits, comment pensez-vous qu’elle fonctionne? Pas au bois! Oui bon on peut acheter une génératrice. Z’avez-vu les prix? Au lieu de cela je garde de grandes quantités d’eau en réserve), si rien d’innattendu ne brise. Tiens, la maison aussi a son propre temps. Et pour que tous ces rythmes s’accordent, il faudra, eh bien… du temps.
Un de tes premiers billets que j’ai lu, et combien il dit vrai.
Parfois il m’arrive de ne pas m’entendre avec (non, plutôt comprendre) les urbains et ce qu’ils voudraient des ruraux!
Pourtant, je ne déteste pas la ville… Non, j’ai simplement l’impression qu’il y a là un nombre impressionnant de gens qui n’ont aucune idée de la vrai réalité rurale et que leurs demandes en approvisionnement de produits comestibles est irréaliste quant au prix demandé, à la quantité et à la qualité.
Que c’est gentil de me dire que c’est un des premiers que tu as lus! Car si on ne me le dit pas, je ne sais pas, moi!
L’hiver achève… finalement oui, ça a été un repos en quelque sorte. Mais ce n’était pas choisi! Autant on a eu à s’adapter à l’air pur qui nous endormait profondément très tôt chaque soir le printemps dernier, autant on a vécu et ressenti l’impact de la réduction des heures de lumière, comme jamais avant en ville! Maintenant que je vois le soleil au-dessus des arbres à 6h30 et que l’Homme peut promener Tango et revenir passé 17h à la clarté, je me sens revivre!
Et l’hiver, moins affairé, m’a mené à craindre (oui, craindre!) le retour des beaux jours et des efforts qu’ils requièrent. Mais ma crainte s’est évanouie au soleil! Samedi passé on était quatre (avec Tango) à se prélasser au soleil, peu vêtus pour le mois de mars, sur la terrasse. Le bien que ça m’a fait, incroyable. Ça a rechargé ma batterie!
Oh que je comprends ce sentiment de batterie rechargée!
Bien que chez moi, avec mon grand pan de fenêtre ça soit moins vrai. On a comme une luminothérapie dans le salon même en plein hiver!!!
Sauf que… maintenant la cocotte sort de l’autobus en fin d’après-midi et il fait claire. Maintenant, la cocotte attend l’autobus le matin et il fait claire. Dire que la semaine prochaine cette dernière affirmation ne sera plus vrai pour quelques temps… C’est qu’on change l’heure en fin de semaine! Nous allond perdre une heure de sommeil… et de clarté le matin. Je n’aime pas le changement d’heure dans ce sens-là. J’ai toujours l’impression d’y perdre au change vu qu’on est des lève-tôt ici. C’est pire depuis que les USA on changer de week-end pour ce changement et que nous avons suivi!
Bon, une chance que tu es là: je ne savais pas! (Je dois justement appeler ma mère tantôt; elle me l’aurait sûrement dit!)
Ah merde. Ça me tente pas. J’aime pas cette histoire de changement d’heure ni d’un bord ni de l’autre. Ouache.
(Moi aussi j’ai bien des fenêtres et toujours de la lumière naturelle, mais j’ai besoin d’elle plus longtemps que ce qu’elle offre en hiver!)