Ce matin en promenant Tango, je regardais le ciel. Un ciel… à perte de vue. Ici tout près, des champs, vert tendre et vert foncé, puis la route, invisible, des vallées et des collines, des maisons, très peu, et le ciel qui se hachurait pour se découvrir. Hier soir, quand j’ai sorti Tango avant d’aller me coucher, la pleine lune (spécialement commandée pour l’anniversaire de Meckboy) éclairait tant qu’elle m’éblouissait. Quand je m’approche du jardin d’eau, plouf, plouf, plouf et plouf font toutes les grenouilles, qui se glissent sous les nénuphars. Tout autour de la maison, chaque jour une nouvelle floraison. La vie, partout. Éclatante.
D’habitude, l’été, nous allons à Natashquan. C’est un pélerinage familial, un renouveau annuel. Cette année, avec l’achat de la maison, nous n’irons pas (mais l’an prochain… j’y pense déjà!). En plein août, je m’avance dans l’océan de chez nous, je laisse la mer me laver des souillures de l’année, et je me rapproche davantage de qui je suis. Il m’a fallu près de trois mois ici pour découvrir que j’y ai le même sentiment, mais en plus subtil peut-être. Rien d’aussi spectaculaire qu’une masse d’eau salée qui vous porte et vous berce, mais le chant des oiseaux, le silence relatif de la nature, le vent qui transforme les arbres, le ciel… rempli d’étoiles. Chaque jour.
Dans ma tête où tout tourne toujours trop vite, j’ai des jours d’épuisement. Il y a trop à faire, je n’y arrive pas, et malgré une vie somme toute bien remplie jusqu’ici, la somme des connaissances et des ressources dont j’ai maintenant besoin mais que je ne sais où trouver est un poids écrasant, qui me pèse souvent, par moments. Comme si tout ce que je sais… m’était plutôt inutile dans cette nouvelle vie. C’est faux, mais il me faudra du temps pour en trouver l’utilité. Entre temps, j’ai justement besoin de prendre plus de pauses, de m’arrêter à intervalles plus réguliers. Pour regarder et écouter. Faire taire les petites voix et être, simplement.
Il me faut faire un effort pour penser à ma vie d’avant. Pour me souvenir que je voyais à peine le Mont-Royal de mon balcon, alors que j’ai derrière chez moi une colline probablement aussi volumineuse, et qui a en diversité écologique ce que le Mont-Royal peut avoir d’historique. Pour repenser au concept des voisins qu’on entend parler et marcher. J’ai tout évacué, oublié. Une fuite vers la vie. Et ça me fait sourire de penser qu’en voulant planter mes racines bien profondément dans la terre où elles ont grandi, c’est mon ciel que j’ai élargi.